C’est la conviction des acteurs engagés dans la préservation de la biodiversité, participants au tout premier forum sur les ressources génétiques.
Avec plus de 11000 espèces animales, plantes et microorganismes, le Cameroun a l’une des biodiversités les plus diversifiées au monde. C’est un fait ! Cependant, dans quelles mesures les ressources génétiques représente un trésor pour toutes les parties prenantes à l’exploitation de ces richesses ? Particulièrement les populations locales et les communautés, dans lesquelles elles se trouvent en abondance. C’est la grande question qui se pose. Lorsqu’on fait une simulation, l’exploitation des ressources génétiques rapporte d’énormes gains économiques, qui ne profitent malheureusement qu’aux exploitants. Les assises de Yaoundé viennent donc poser les bases d’une meilleure répartition des bénéfices à tous les acteurs impliqués, de la fourniture à l’exploitation.
« Ce forum représente une opportunité énorme pour les communautés autochtones et locales, puisque ça révèle un processus basé sur une convention internationale, la convention sur la biodiversité. Avant, les chercheurs venaient cueillir les avoirs traditionnels pour faire des millions. Aujourd’hui grâce à la loi APA 2021, tous les produits recherchés et dont les résultats sont commercialisés doivent être partagés équitablement avec les populations autochtones et locales », souligne Sa Majesté Fon Lekunze Nembo Ngwe III, Chef supérieur Bamumbu, Sénateur élu de la région du Sud-ouest. A l’occasion, Porte-parole des populations autochtones et des communautés.
Le Protocole de Nagoya sur APA au cœur des travaux
C’est en réalité du Protocole de Nagoya sur l’Accès aux ressources génétiques et le Partage juste et équitable des Avantages découlant de l’utilisation, qu’il s’agit au cours du forum des 16 et 17 Janvier à Yaoundé. C’est un accord international sur la biodiversité, issu de la Conférence sur la diversité biologique (CDB) des Nations Unies, tenue le 29 Octobre 2010 à Nagoya au Japon.
« Le Protocole de Nagoya sur APA donne une part belle aux savoirs traditionnels qui sont exploités quand il s’agit des ressources génétiques. Un cas fort simple : Dans le village on mange la cola et on se rend compte que ça donne de la vigueur. Alors, le scientifique prend la cola, l’amène dans un laboratoire et va chercher à l’intérieur le gène qui permet d’avoir cette vigueur-là. C’est donc le savoir qui a orienté la recherche. Il en est de même pour l’alimentation, pour les plantes médicinales, pour l’habillement et pour bien d’autres choses. Je suis habillé en écorces de bois, mais la science peut se questionner sur ce qui permet de l’avoir et désormais au lieu de couper du bois, on utilisera une formule scientifique née des laboratoires, pour avoir le même produit », explique Sa Majesté Bruno Mvondo, Coordonnateur du Réseau des Chefs traditionnels d’Afrique pour la gestion durable de la biodiversité et des écosystèmes des forêts (Rectrad).
La destruction des ressources sera ainsi réduite, la biodiversité préservée, les industries créées, et le développement économique et social endogène assuré.
« Nous sommes invités à mettre en œuvre ce qui a été dit. Chacun a sa partition à jouer. Nous avons les populations autochtones, nous avons les chercheurs, les enseignants, les économistes entre autres », déclare le ministre de l’environnement, de la protection de la nature et du développement durable, Hele Pierre.
Au village des expositions
La foire-exposition du forum sur les ressources génétiques tient ses quartiers au musée national. Un tour aux stands permet de voir et découvrir des produits et services issus de la biodiversité camerounaise. Universités, centres de recherches, coopératives, start-up partagent les savoir-faire.
« On a un jardin botanique à Mfou, qui permet d’augmenter le nombre de plantes, des plantes dont on a besoin. On forme les tradithérapeutes. On a des produits antibactériens, des antidouleurs, même des tisanes », signale Kinga Joseph Yenika, Expert en technologies pharmaceutiques à l’Institut de recherches médicales et d’études des plantes médicinales (Impm)
Le département de Chimie de l’Ecole normale supérieure de Yaoundé quant à elle présente sa plateforme d’analyses chimiques pour le contrôle qualité des médicaments, aliments et produits cosmétiques.
« Si vous avez un produit et vous voulez connaitre l’ensemble des éléments chimiques qui s’y trouvent, vous pouvez venir dans notre département et vous aurez toutes les informations nécessaires. Nous avons des équipements qui sont capables de déterminer minutieusement et profondément tout ce qu’une bio ressource détient en matière de composés chimiques », expose Guy Hector Fendoung Detiang, Enseignant chercheur à l’Ens.
Marie Judith Ndongo