Rassembler et acheminer les déchets des ménages à la décharge communautaire située en face du lycée d’Emana, afin d’être collectés pour la décharge définitive, Bernard Essomba, Albert Ndongo et Stéphane Ntsama s’y mettent avec passion et détermination. Infatigables et motivés, les trois éboueurs et fiers de l’être nous amènent pour une tournée poubelle à Emana centre, une localité du premier arrondissement de la ville de Yaoundé
Vendredi 27 Juin 2025. Il est 07h passées de 55 minutes, lorsque Stéphane Ntsama, au guidon d’un tricycle offert au Comité de développement d’Emana centre par le ministère de l’Habitat et du développement urbain (Minhdu) en Août 2024, se pointe au « Carrefour Emotion », lieu de départ pour la pré-collecte des déchets. Déjà sur les lieux, ses coéquipiers Bernard Essomba et Albert Ndongo.
« Ça va secouer dans certaines zones », prévient Bernard Essomba avant d’embarquer. Ça annonce la couleur : avec ce trio, pas de temps à perde, la journée est bien longue. Dans un fou rire, ils se rappellent de l’incident vécu il n’y a pas longtemps à Nkolbifon, à cause du mauvais état de la route, dû à la pluie, alors que démarre une tournée sous un ciel plutôt clair. Néanmoins, les sacs doivent être ramassés, qu’il vente ou qu’il pleuve. Mais pour ces soldats du déchet, le boulot est loin d’être une corvée, malgré les intrigues de plusieurs.
« Je suis content d’être éboueur », « Je suis à l’aise, même comme les frères du quartier se moquent de nous », « C’est un travail noble », confient respectivement Bernard Essomba, Albert Ndongo et Stéphane Nstama

Stéphane Ntsama et Bernard Essomba, ramassant le seau d’ordures d’un client
Enthousiastes, ils se donnent à 200% pour chaque ramassage. Après avoir sauté du tricycle en mouvement, Bernard et Albert se dirigent le plus vite possible pour atteindre les sacs et seaux poubelles, les saisir et balancer les ordures dans la benne, non sans adresser des mots gentils aux clients, et prospecter de potentiels futurs partenaires. Au même moment, Albert délivre les factures à certains.
« C’est comme ça que ça se passe », lancent-ils, avec du sourire.
Stéphane, le plus jeune, a intégré l’équipe il y’a presque deux mois. Il regrette cependant l’hostilité des jeunes à s’investir dans cette activité.
« Il faut s’armer de courage et aimer ce qu’on fait. Les débuts sont difficiles, mais avec le temps on s’en sort », conseille-t-il. Et à Albert de signaler que : « Nous avons besoin de main d’œuvre. Ce travail est intense pour deux personnes, étant donné que la localité est vaste, avec 12 blocs ».

Albert Ndongo, à la décharge d’Emana
Sortir de la précarité
Bernard, Albert et Stéphane ramassent environ 300 seaux de poubelles par semaine, à raison de deux fois, précisément le Mardi et le Vendredi. Mais les journées éprouvantes sont loin d’atteindre l’engouement des éboueurs, fiers d’exercer ce travail d’utilité publique. Père de quatre enfants, Bernard a trouvé de quoi occuper ses journées.
« Je m’ennuyais à la maison. Les travaux champêtres ne m’occupaient pas assez », révèle-t-il.
Pour Stéphane et Albert, c’est aussi une façon noble de sortir quelque peu de l’oisiveté.
« Une connaissance à la mairie m’a fait part du besoin d’un chauffeur tricycle à Emana centre. J’ai déposé ma candidature et j’ai été retenu. J’en suis satisfait », « J’ai eu à faire de petits boulots sans intérêt, à cause de certaines contraintes. Mais ici, je trouve mon compte », disent-ils.
C’est aux environs de 18h généralement que s’achèvent leurs journées laborieuses, mais la passion de Bernard Essomba, Albert Ndongo et Stéphane Ntsama pour les poubelles n’a pas de limite. Chacun veut mettre ce métier porteur en vitrine, en parler et vraiment le montrer sous une autre facette.
Déversement des déchets dans la décharge
Marie Judith Ndongo